Le lendemain matin, ils retournèrent tous les deux sur place, François refusant toujours de venir, ce qui perturba légèrement Nicolas. Il lui dit alors pour le calmer :
« Ça n’a rien à voir avec toi. C’est uniquement d’ordre personnel ».
Les traits du garçon s’adoucirent à ces quelques mots. Puis ils y allèrent.
Sur place, l’homme était encore là. Nicolas retourna au centre pour continuer à approfondir son lien avec son élément. Pendant ce temps, Paul s’approcha de cet individu pour discuter.
« Vous devez être le précédent héritier de l’esprit de la terre, je me trompe ? » demanda-t-il.
« En effet, c’est bien ça » acquiesça celui-ci.
« Vous vouliez savoir si vous ne vous étiez pas trompé en lui donnant le médaillon, n’est-ce pas ? » poursuivit-il.
« Pas vraiment. Je sais qu’il en a le potentiel. Je voulais juste voir son évolution » expliqua le vieil homme.
« C’est pour ça que votre âme est toujours liée à ce monde » déduit-il.
Après un moment de silence, il rajouta :
« Il ne vous a toujours pas pardonné ».
« J’en suis conscient » admit le fantôme.
Vingt-et-un an plus tôt.
« Chérie, maintenant qu’il a six ans, j’aimerais l’emmener là-bas » indiqua le mari.
« Je suppose qu’on n’y peut rien, même si j’ai toujours beaucoup d’appréhension à ce sujet » répondit la femme, inquiète.
Ils préparèrent leurs affaires. Puis, ils prirent congé de leur famille.
« Au revoir grand-père » dit François, se dirigeant vers lui pour le prendre dans ses bras.
« Ne me touche pas. Je ne veux pas qu’un demi héritier des esprits s’approche de moi » répondit celui-ci froidement en l’arrêtant de sa main gauche.
« Papa ! » s’écria sa fille en colère.
Le petit garçon sortit en courant de la pièce, les larmes au coin des yeux.
« Je n’irais pas jusqu’à le renier mais je ne veux plus être confronté à sa présence » poursuivit celui-ci.
« Même en connaissant tes intentions, je pense que tu vas trop loin » répliqua la mère.
« Il sait que vous avez fait ça pour son bien. Néanmoins, il n’a jamais pu oublier la blessure issue des mots que vous avez utilisés » précisa Paul.
« C’est ce que ma fille m’a reproché à l’époque. Pourtant, il était nécessaire qu’il fasse un choix » signala le vieil homme.
Mais qu’est-ce qu’il lui prend de parler tout seul se demandait Nicolas pendant sa méditation.
« Il n’y aucun risque à rester ici ? » questionna le troglodyte.
« Non, je le saurais suffisamment tôt. Et puis, Paul peut toujours intervenir le temps que j’arrive » le rassura François.
Après une semaine d’entraînement, Nicolas ne constatait toujours aucun résultat. Il se demandait s’il en était réellement capable avant d’y retourner à nouveau.
« Il ne s’est pas rendu compte des progrès qu’il a effectués depuis le début. Il est maintenant en symbiose avec son élément. Le problème qui subsiste, ce sont les échanges mutuels : en effet, tous les minéraux lui envoient des signaux alors que lui n’arrive pas à les sentir et à leur répondre. Il lui faudrait peut-être un déclic » expliqua François au vieil homme juste après leur départ.
Environ une heure après leur arrivée, quelqu’un s’approcha de Nicolas par derrière.
« Je t’ai enfin trouvé, héritier de l’esprit de la terre » s’annonça celui-ci, fier de ses résultats.
Nicolas tourna la tête par-dessus son épaule droite.
Merde, ils ont déjà envoyé un converti réalisa Paul, inquiet, caché derrière un tronc.
C’est pas vrai, ils sont déjà passés à l’action remarqua François au même instant.
« Ils ont envoyé un de leurs hommes. Paul devrait pouvoir tenir assez longtemps » annonça François pour prévenir le troglodyte.
« Soyez prudents les enfants » souligna monsieur Eugène avant qu’il ne s’éloigne trop.
Nicolas se redressa face à cet individu qui venait d’arriver.
« On va commencer doucement : boule de terre » prévint l’homme.
Nicolas n’eut pas le temps de réagir. Elle frôla son oreille gauche.
« Tient une autre » poursuivit-il.
Le garçon se décala sur sa gauche et évita ainsi le projectile qui venait en direction de son genou droit.
« Tu as de bons réflexes mon petit. Allez, on continue » lança-t-il, amusé par la situation.
Cette fois-ci, Nicolas esquiva de justesse cette sphère de terre qui cheminait vers son avant-bras droit en faisant un léger pas à gauche.
« Et voilà la suivante » prononça-t-il presque instantanément.
Cette fois, il ne pourra pas s’en sortir.
A cette pensée, Paul couru vers Nicolas et le fit basculer depuis son côté gauche. Ils se retrouvèrent au sol, couverts de poussières.
« Quoi! Ces enquiquineurs sont là également. On va passer aux choses sérieuses alors. Explosion » dit l’inconnu, agacé.
Les boules de terre éclatèrent en fines particules, les projetant ainsi quelques mètres plus loin car ils étaient en train de se redresser. Leurs habits s’éventrèrent et de fines coupures laissaient apparaître du sang.
Se relevant péniblement après le choc, Nicolas s’aperçut que Paul s’était placé juste devant lui pour le protéger. Il se tenait l’épaule gauche avec sa main droite, ayant été touché quand il est venu à son secours, mais pas suffisamment tôt pour l’éviter lui aussi.
« Intéressant comme situation. Voyons voir combien de temps tu pourras tenir » se réjouit l’individu avant d’ajouter :
« Averse de billes ».
Il mis sa main droite devant lui et des mini sphères furent envoyées à une vitesse ahurissante, comme une averse de grêlons assez soutenue. Au contact de la peau de Paul, celles-ci se désintégraient la plupart du temps. Cependant, certaines ne se disparaissaient pas complètement et les cristaux produits de cette façon entaillèrent les vêtements ainsi que l’épiderme. Ces écorchures étaient peu profondes et on pouvait voir que les plaies cicatrisaient d’elles-mêmes assez rapidement. Rares étaient les projectiles qui atteignaient Nicolas, le corps de Paul jouant parfaitement son rôle de bouclier.
C’est pas possible! Si je ne fais rien, on va tous les deux y passer songea le jeune homme en voyant ce qui se déroulait sous ses yeux.
Il ferma ses paupières pour se concentrer, tellement que ses mains se serrèrent et son visage se crispa.
Quelque chose. Quelque chose. Il faut que je fasse quelque chose!
Il n’arrêtait pas de se dire ça dans sa tête. Soudain les pierres ovoïdes se soulevèrent et s’assemblèrent pour former un gigantesque mur devant Paul. Au même instant, l’adolescent ressentit une intense sensation de brûlure au niveau de la nuque et y envoya sa main droite examiner la zone douloureuse.
« Pff. Tu as réussi à éveiller tes pouvoirs. Je n’ai plus aucune raison de me retenir dans ce cas. Atomium(1) » marmonna l’homme, déçu d’avoir échouer sa mission.
Ils se retrouvèrent enfermés dans une prison de sphères de métal. Celles-ci commencèrent à se mouvoir vers eux mais elles tombèrent sur le sol avant de les atteindre. François était arrivé par derrière et avait assommé l’inconnu d’un coup sur la nuque, le faisant s’écrouler au sol.
(1) Monument de structure métallique représentant un atome à Bruxelles